Livre : Dérives nutritionnelles & comportement suicidaire

Ou comment briser tous vos rêves vegan

Robert Masson est très célèbre et même reconnu. Dans les années 70, il a contribué à la montée en puissance de la naturopathie ; terme très vague s'il en est, un peu fourre-tout, car Robert Masson me semble appartenir bien plus à la catégorie des naturothérapeutes qu'à celle des naturopathes.

Passons.

Au travers de son livre Dérives Nutritionnelles et Comportement Suicidaire, véritable "plaidoyer pour une alimentation équilibrée", M. Masson se propose d'ouvrir les yeux du lecteur et de le mettre en garde face à toutes les nouvelles méthodes d'alimentation qui fleurissent de-ci de-là.

Voyons voir...

Etude en bonne et due forme

Démarrons : la couverture est austère et fait déjà peur. Elle semble à elle seule mettre le lecteur en garde face aux différentes méthodes de nutrition citées : végétalisme, crudivorisme, frugivorisme, macrobiotique,... En quatrième de couverture la poésie est au rendez-vous : "C'est [le livre est] aussi un garde-fou contre [...] ces gourous de l'alimentation qui inventent des dogmes alimentaires, véritables chants des sirènes vers des abîmes d'où l'on ressort amoindri à tout jamais.". On en aurait presque la larme à l'œil et la chair de poule ! Effectivement, ici on ne fait pas dans la dentelle, le livre est là pour marquer les consciences et n'hésite pas à user de grandiloquence pour attirer l'attention. Gagné.
Oui, mais... j'ai eu beau chercher, retourner le livre dans tous les sens, je n'y ai trouvé qu'une table des matières ; et aucunes références scientifiques ! Pas une bibliographie, RIEN. Okay, Robert Masson est un ponte de sa discipline, son nom seul est une garantie de qualité... N'empêche que tout scientifique un tantinet sérieux inclut des références et une bibliographie à son ouvrage, surtout quand ce dernier touche à un sujet de santé tel que l'alimentation ! Poursuivons par le contenu de l'ouvrage, lequel est censé nous délivrer la "réalité", des témoignages ainsi que des expériences.

La réalité est ailleurs

Le premier chapitre est consacré au végétalisme. La première partie est titrée "Non, les protéines animales ne sont pas un apport important en purines". On nous présente ainsi un tableau détaillant la quantité de purines pour 100 g et pour différents aliments. Les légumineuses ont un taux de 180 à 220 mg, supérieur à celui de la viande qui est de 80 à 120 mg. Ce qui est étrange, c'est que ce même tableau est trouvé sur Wikipédia.org et qu'il ne présente pas les mêmes résultats. Je dis merci M. Masson pour le rétablissement de la "vérité", et je me permets d'apporter ma pierre à votre édifice : vous avez omis de citer le ris de veau, dont le taux de purine aux 100 g est de... 990 mg ! Il est d'ailleurs étrange que Wikipédia n'ait pas changé ses références (eux en ont, au moins) pour inclure votre livre !

Témoignages à la gloire de notre Sauveur

Une chose souvent reprochée aux végétaliens, notamment, est leur dogmatisme, les poussant à une propagande et une idéalisation de leur régime alimentaire. Mais ces excès de verbe ne sont évidemment pas l'apanage des herbivores humains ! Le livre est parsemé de témoignages venant appuyer le propos de M. Masson. Mais ceux-ci font tous l'apologie des méthodes et conseils du naturothérapeute ou bien la critique mélodramatique des régimes alimentaires décriés par l'auteur. Au menu :

 "Femmes allaitantes : Geoffroy et quelques autres conseillent un régime végétalien comme l'idéal dans ce cas ? elles vont avoir plus de lait et meilleur ? Erreur, les femmes végétaliennes voire végétariennes n'ont souvent aucun lait..."

"je suis plein de pellicules, je perds beaucoup plus de cheveux. [...] Je deviens de plus en plus raide, mes articulations craquent avec un bruit sec de bois mort."

 " Comment se fait-il qu'une naturopathie aussi aberrante soit si largement diffusée et que votre naturopathie tenant compte de l'équilibre alimentaire et de l'individualisation humaine le soit si peu..."

"Monsieur, J'ai bien reçu votre ordonnance [???] m'indiquant les remèdes pour troubles prostatiques et je avoue [vous ?] en remercie."

Voilà quelques morceaux choisis, mais sachez que de manière générale les témoignages semblent décrire des situations dramatiques, de véritables engrenages, des pièges qui se referment sur les gens. À la fin de l'ouvrage, vous pourrez même trouver des photographies assez choquantes de personnes ayant connu des "dérives nutritionnelles". Le seul point positif concernant ce livre est qu'il met en garde et vous permet de porter une grande attention aux changements opérés dans votre métabolisme et votre vie en général. Bien qu'il ne me semble pas de qualité, ni très rigoureux, je recommande la lecture de ce livre à tous ceux et à toutes celles qui veulent réellement aborder le végétalisme sous tous les angles, sans se voiler la face ; il est toujours intéressant de croiser les informations et de varier les sources. À bon entendeur...


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